Année
2007
Abstract
La notion de  » processus « , qui décrit la coopération entre pratiques et compétences hétérogènes pour aboutir à un certain type de résultat, a conquis une position clé dans les pratiques managériales au cours des vingt dernières années. Ce texte présente trois idées sur la place des processus dans les dynamiques organisationnelles, il teste leur applicabilité aux questions de sécurité du travail dans le cas d’une entreprise du bâtiment. Première idée : le succès de la notion de processus manifeste le rôle central de l’activité collective  » conjointe  » (combinant des activités complémentaires, par opposition à  » commune « , combinant des activités analogues) dans l’apprentissage organisationnel. L’activité collective  » conjointe  » est dialogique ( » les actes parlent « ) et médiatisée par l’utilisation de systèmes sémiotiques (langages et instruments techniques ou managériaux). Deuxième idée : l’apprentissage organisationnel n’est fondé ni sur la subjectivité individuelle des acteurs ni sur les artefacts technologiques objectifs engagés dans les processus, mais plutôt sur la compréhension et la reconception continue des processus par les acteurs du processus eux-mêmes, dans le cadre d’une enquête réflexive et dialogique,  » activité collective sur l’activité collective  » déclenchée et dynamisée par des jugements évaluatifs sur le processus. Troisième idée : il y a de multiples possibilités de délimiter les processus dans une organisation. L’enquête réflexive enacte une configuration spécifique sociale, spatiale et temporelle du processus, son  » chronotope « , pour reprendre le vocabulaire de Bakhtine. Le chronotope du processus influence profondément la manière dont les acteurs peuvent faire sens de l’activité collective et la transformer. Une étude de cas longitudinale sur la sécurité du travail sur les chantiers de bâtiments montre qu’il est difficile de supprimer le danger par des moyens de contrôle, une fois que la conception a été réalisée, dans le cadre du processus  » exécuter le projet « , mais qu’il est plus aisé de réduire le danger par la conception, quand les acteurs conçoivent et reconçoivent collectivement leur activité collective, des toutes premières phases d’un projet de construction jusqu’à son achèvement. Une voie majeure pour améliorer la sécurité est donc d’étendre le chronotope de l’activité collective étudiée, en dépassant la séparation traditionnelle entre  » conception / planification  » et  » réalisation « . La conclusion résume les principaux enjeux théoriques, epistémologiques et pratiques de cette recherche sur l’activité collective conjointe.
LORINO, P. (2007). Process Based Management and the Central Role of Dialogical Collective Activity in Organizational Learning. The Case of Work Safety in the Building Industry. ESSEC Business School.